92-OURO-GNAOU Nazifou
Né vers 1988 à Sokodé, dans la Préfecture de Tchaoudjo, mécanicien automobile, OURO-GNAOU Nazifou a été arbitrairement arrêté à Lomé, dans l’Affaire « Tigre Révolution », le 4 mars 2020.
Ce jour-là, il est dans son atelier au quartier Agoè-AGIP lorsque, vers 11H, en plein de travail sur une voiture, il voit arriver vers lui plus de quatre personnes qui lui demandent combien il vend cette voiture et il leur répond qu’elle n’est pas à vendre.
C’est alors que l’un d’entre eux sort un pistolet qu’il pointe sur son ventre en lui disant que s’il n’accepte pas ce qu’ils vont lui dire, ils le tuent sur place. Puis, ils le passent à tabac.
Surpris et en colère, il garde néanmoins son calme, étant en position de faiblesse face à eux, et finit par s’exécuter lorsque celui d’entre eux qui a sorti et pointé sur son ventre le pistolet lui parle en Cotocoli pour lui demander de les suivre. Ils le conduisent donc vers l’endroit où ils ont caché leurs voitures avec lesquelles ils sont venus.
C’est en arrivant vers ces voitures dont l’une, petite voiture portant une plaque d’immatriculation de taxi et deux autres voitures noires de la Police frappées du sigle « GIPN », qu’OURO-GNAOU Nazifou voit son ami OURO-Médji Sadikou installé à l’intérieur du taxi et lui dit : « C’est toi qui les a amenés ici et ils ont commencé à me frapper n’importe comment au garage ? »
Après qu’ils l’aient bien menotté, il constate que ceux qui sont venus vers lui ne sont pas en tenue militaire mais plutôt en civil et que tous tiennent des pistolets.
Dès qu’ils se sont ainsi saisis de lui, ils l’obligent à les conduire chez lui et il leur indique le chemin allant à son domicile où, à l’arrivée, ils refusent de le laisser prendre sa clé pour ouvrir la porte d’entrée au motif qu’ils ont des matériels dans leur voiture à cet effet.
Malgré ce qui a été ainsi dit, ils cassent sa porte, entrent dans sa chambre pour la fouiller et, n’ayant rien trouvé d’autre que les habits rouge à l’effigie du PNP qu’il porte quand il y a des marches et que tout le monde lui connaît bien puisque, membre actif du PNP dans le quartier Agoè, il y mobilise la population lorsqu’il y a une marche à Lomé.
Lorsqu’ils quittent son domicile, c’est la direction du Camp GIPN d’Agoè-Logopé qu’ils prennent et où ils arrivent.
Dès son premier interrogatoire, les policiers lui posent des questions bizarres, lui demandant notamment s’il ne sait pas où sont les armes qu’on a retirés chez les militaires, ce à quoi il réplique en demandant s’il sait même comment on tire une arme à feu.
Mécontents de sa réponse, ils lui font savoir que, comme il pense avoir la tête dure, eux vont lui montrer de quoi ils sont capables. Mais, comme il n’est pas du genre à qui on cloue facilement le bec, il leur rétorque du tac au tac qu’ils n’ont qu’à le tuer et c’en sera fini puisque, bien que leur ayant dit la vérité, s’ils pensent qu’il a menti, il vaut donc mieux pour eux de le tuer plutôt que de le torturer.
Mis dans une folle colère par sa répartie, le Commandant-même du Camp se met de la partie, se saisit d’un gros bâton pour lui asséner un violent coup sur sa tête qui éclate aussitôt, faisant jaillir du sang qui commence à couler abondamment, ce qui lui donne l’occasion de le narguer, dans une indifférence totale, en lui disant que ce sang versé n’est que le début du commencement.
Les autres policiers présents se saisissent alors de lui pour le conduire près d’un manguier du Camp auquel on l’attache, les pieds en l’air et la tête en bas, ce qui fait couler encore plus abondamment le sang de sa tête blessée.
Puis, ils vont chercher de l’eau, le déshabillent pour le mettre entièrement nu et se mettent à le chicoter, certains avec des cordelettes, d’autres avec des matraques noires tout en lui posant toujours cette même question : « Où sont les armes ? »
Après qu’il ait répondu qu’il ne sait rien de cette affaire d’armes, les policiers le descendent et vont le jeter dans des latrines désaffectées après lui avoir attaché bien solidement pieds et mains et refermé sur lui le couvercle de la fosse pendant plusieurs heures. Lorsque qu’ils estiment que cet incroyable traitement qui lui est infligé a assez duré, les policiers viennent le sortir de la fosse puante et se remettent à le frapper, le tout, sans lui avoir jamais donné l’occasion de manger ni de boire.
C’est après cela que reprend l’interrogatoire auquel on le soumet, conjointement cette fois-ci, avec OURO-MEDJI Sadikou et où revient encore et toujours cette sempiternelle question : « Où sont les armes ? »
Lorsqu’en guise de réponse tous deux disent qu’ils n’ont rien pris de quelqu’un, s’agissant des armes, le Commandant du Camp prend alors de l’eau de Javel qu’il mélange à de la poudre de lessive « So Klin » et verse ensuite cette préparation sur le dos d’OURO-MEDJI Sadikou qu’il commence à chicoter avec une cordelette jusqu’à ce que son dos éclate, en sang.
Lui montrant alors le résultat de cet « exploit », il lui déclare fièrement que, puisqu’il a bien vu le traitement qu’il vient d’infliger à son ami, s’il ne dit pas dit la vérité, son tour arrive bientôt…
Mais, n’en ayant pas encore fini avec les suppliciés, les policiers les attachent tous deux à un poteau autour duquel ils se mettent en cercle pour les frapper comme s’il s’agissait d’un gibier encerclé et capturé au terme d’une battue qu’on tape ainsi indéfiniment pour l’achever. Et, ce n’est que lorsque les policiers ont vu qu’OURO-GNAOU Nazifou a commencé à vomir du sang qu’ils se sont arrêtés.
Le 17 mars 2020, OURO-GNAOU Nazifou est conduit pour son audition à la Justice avec trois autres codétenus : MOUSSA Issa dit Zongolais, ALASSANI Saliou et OURO-MEDJI Sadikou. Lorsqu’il est présenté avec toutes ses blessures au juge instructeur qui voit par ailleurs qu’il n’arrive pas à bien marcher, celui-ci lui demande ce qui lui est arrivé et avec qui il s’est battu pour être dans un si mauvais état. Après qu’il lui ait répondu que ce sont leurs militaires (en fait les policiers du Camp GIPN d’Agoè-Logopé) qui l’ont mis dans cet état, ce juge a fait appeler les agents qui les ont amenés à la Justice pour leur dire qu’ils n’ont qu’à arrêter cela !
A leur sortie du Palais de justice, conduits à la Prison civile de Lomé pour y être enregistrés, un désaccord se produit à leur sujet entre agents de la force publique. Car, dès qu’ils les ont vus, les gardes pénitenciers de la Prison ont compris ce qu’on leur a fait subir au Camp GIPN et, inquiets de leur sort, s’opposent à ce que leurs collègues policiers accompagnateurs les y ramènent lorsque ceux-ci les en informent.
Mais les dits policiers, par malice, ont répliqué qu’il ne peut en être ainsi car ils doivent les ramener au Camp GIPN pour aller rendre compte à leur Commandant.
Et, dès leur arrivée au Camp GIPN, les policiers et leur Commandant ont fait payer à OURO-GNAOU Nazifou son audace en le soumettant à des tortures plus cruelles encore que celle qu’il a endurées jusque-là, juste parce qu’il a été dire au Juge ce qu’ils lui ont fait subir.
Cela dura encore longtemps car ce n’est qu’au bout de 9 bons mois au total passés sous la torture au Camp GIPN d’Agoè-Logopé qu’il est finalement ramené à la Prison civile de Lomé où il est toujours actuellement détenu.
Parce qu’il a subi des traitements cruels, inhumains et dégradants tout au long de son arrestation et de sa détention comme les 77 autres prisonniers politiques détenus dans l’Affaire « Tigre Révolution », OURO-GNAOU Nazifou doit être libéré immédiatement et sans condition comme le prescrivent le Code pénal togolais et les instruments internationaux ratifiés par l’Etat togolais.