PYRAMIDE - LA SOLUTION À LA CRISE CINQUANTENAIRE DU TOGO

ALASSANI Saliou

Arrêté 26 février 2020

91- ALASSANI Saliou

Né le 31 décembre 1986 à Sokodé, coiffeur, marié et père de 3 enfants, ALASSANI Saliou a été arbitrairement arrêté dans l’Affaire « Tigre Révolution » à Sokodé, le mercredi 26 février 2020.

C’est deux jours après la proclamation des résultats de l’élection présidentielle du 22 février 2020 qu’aux environs de 19H 15 où il vient de finir devant son club de Téléfoot le rituel d’ablution l’apprêtant à la prière musulmane de 19H appelée ICHA, il voit subitement, sortant de nulle part, un taxi se présenter devant lui, rempli d’hommes en uniforme noir, tous cagoulés, lourdement armés, portant matraques et gourdins. Ces derniers en descendent et, avant même qu’il ait pu dire quoi que ce soit, ils se mettent à le tabasser sauvagement tout en lui posant des questions à propos de faits et mots auxquels il ne comprend rien du tout, une situation d’autant plus affreuse qu’il ne les connait absolument pas, ne sait pas de quoi ils parlent.

Après quoi, ils lui mettent une cagoule et l’enlèvent pour le conduire à un poste de police où on le garde, toujours cagoulé, pour la suite des événements. Car, dès leur arrivée sur place, commence un véritable calvaire pour lui, avec une bastonnade à coups de gourdins et de cordelettes, sans qu’il ne puisse voir d’où viennent les coups qui pleuvent sur lui. Dans le même temps, il est soumis à une fouille en règle au terme de laquelle on l’interpelle en lui demandant si ce n’est pas bien lui Soliha. Il répond : « Non », précisant que, lui, s’appelle Saliou. A peine a-t-il donné cette réponse que la bastonnade reprend de plus belle !

Le vendredi 28 février matin, il est conduit au Camp militaire de Sokodé, situé dans le quartier de l’ancien dépôt de brasserie à côté de la Gendarmerie du Camp-Lion. Là, on l’accuse de faits qu’il ne reconnait pas et le dit, suscitant de l’officier qui l’a arrêté cette réplique par laquelle il cherche à l’intimider en lui disant qu’il doit savoir que c’est le président Faure qui a ordonné de l’arrêter puisqu’il ne reconnait pas les faits qui lui sont reprochés. C’est alors qu’il lui apprend avoir quitté Lomé pour venir le rechercher à Sokodé et, qu’étant à ses trousses depuis plus d’un mois, c’est grâce à la sœur de l’un de ses amis policiers, qui est coiffeuse au quartier Komah de Sokodé, qu’ils ont finalement réussi à mettre la main sur lui.

Après cet interrogatoire, un transport est organisé pour une perquisition à son domicile qui est méticuleusement fouillé jusque dans sa chambre. Ensuite, s’organise un convoi avec lui en direction de Lomé. Dans la voiture qui le transporte, il a les deux mains enserrées non seulement par des menottes au poignet mais aussi par des chaînes qu’on met au cou des chiens, lesquelles chaînes sont si solidement tenues par les agents qui l’encadrent des deux côtés qu’il n’arrivait même pas à bouger les pieds.

Durant tout le trajet qu’il fait dans cette pénible position, il n’a bien entendu pas eu droit à boire la moindre goutte d’eau, ni à manger quoi que ce soit, ayant été maintenu constamment cagoulé, avec des armes bien braqués sur lui. A Lomé, c’est le Camp GIPN d’Agoè-Logopé qui est leur destination finale.

Il est à préciser que, lorsqu’il a été arrêté, il avait sur lui un porte-monnaie contenant une somme 304.750 F mais, à leur arrivée au Camp, il s’aperçoit qu’après les arrêts et changements de voiture qu’ils ont faits sur le trajet, il ne lui restait plus que 218.000 F. Où est passé le reste de l’argent ? Grand mystère qu’on ne peut que trop facilement comprendre…

Dès leur arrivée Camp GIPN d’Agoè-Logopé, les agents sur place prennent le relais de leurs collègues de Sokodé, lui administrant aussi à leur tour leur part de séances de bastonnade. Le tout, en déversant sur lui une revancharde colère en hurlant que c’est à cause de gens comme lui qu’ils ne voient pas leur famille depuis le 19 août 2017. Propos sans cesse répétés, entrecoupés de vigoureuses séances de tabassage.

Dans ce Camp GIPN, le commandant lui-même s’est mis à la tâche, le tabassant copieusement dans la journée, alors qu’il ne savait même pas encore où il vient d’arriver ayant toujours été maintenu cagoulé. Chaque matin par la suite, les séances de tortures et autres traitements cruels, inhumains et dégradants reprennent, avec la même question qui revient inlassablement lui demandant de dire où se trouvent les armes.

Et, lorsqu’il répond qu’il n’est pas un corps habillé, ni un braqueur, ni un chasseur, et qu’il ne sait pas tirer mais qu’il n’est qu’un simple détenteur de club de Téléfoot, c’est une séance de passage à tabac qui reprend à nouveau. Au cours de celles-ci, on amène une chaise qu’on lui met sur les jambes bien allongées par devant sous les pieds de la chaise de telle sorte qu’au moment de la séance de passage à tabac, il ne puisse pas faire de mouvement. Et on le frappe dans cette position, à coups de gourdins, de machettes et de poings jusqu’à ce qu’il perde parfois connaissance. Dans ce cas, on verse de l’eau sur lui pour qu’il reprenne connaissance et, lorsqu’il revient à lui, la séance de coups reprend, et ainsi de suite…

Le 17 mars 2020, après qu’il ait été ainsi bien torturé pendant trois bonnes semaines, on le conduit chez le Juge d’instruction qui l’inculpe et le place sous mandat de dépôt à la Prison civile de Lomé. Mais, avant d’être conduit chez le Juge, le Commandant du Camp a tenu à bien lui faire comprendre que s’il a le malheur d’aller dire au juge qu’ils l’ont torturé, à son retour : « Hummm ! », il va voir plus que ce qu’il a vu jusque-là !

C’est sans doute pourquoi, de la Prison civile de Lomé, il est à nouveau extrait pour être ramené au Camp GIPN d’Agoè-Logopé, après avoir été pris en photo au service d’identification judiciaire, puis enfermé dans une cellule où il a retrouvé d’autres détenus qui ont aussi été arrêtés et conduits au Camp en voiture depuis le quartier Agoè-Alinka.

Le 19 octobre 2020, il est ramené à la Prison civile où il est encore actuellement détenu.

Autre sordide détail : au moment où il quittait à nouveau le Camp GIPN d’Agoè Logopé pour la Prison civile de Lomé ce mois d’octobre, des 218.000 F qui lui étaient restés lorsqu’il y est arrivé venant de Sokodé, il ne lui est resté plus un seul franc !

C’est à ce retour à la Prison civile de Lomé qu’on lui apprend que le manque de nourriture et d’eau ainsi que les séances de bastonnades, tortures et autres traitements cruels, inhumains et dégradants subis par ceux qui, comme lui, ont été détenus au Camp GIPN, ont eu pour affligeantes conséquences de faire tomber gravement malade certains d’entre eux qui, l’un après l’autre ont été évacués au cabanon du CHU-Tokoin.

Au final, sur les six qui ont été ainsi évacués au cabanon, 4 d’entre eux ont rendu l’âme et le cinquième, quant à lui, est décédé alors que les prisonniers étaient en quarantaine de préservation contre la pandémie du coronavirus (COVID 19).

Parce qu’il a subi des traitements cruels, inhumains et dégradants tout au long de son arrestation et de sa détention comme les 77 autres prisonniers politiques détenus dans l’Affaire « Tigre Révolution », ALASSANI Saliou doit être libéré immédiatement et sans condition comme le prescrivent le Code pénal togolais et les instruments internationaux ratifiés par l’Etat togolais.