OURO-MEDJI Sadikou
Né le 7 juillet 1983 à Pya-Akéyi, dans la Préfecture de la Kozah, soudeur à l’arc, OURO-MEDJI Sadikou a été arbitrairement arrêté dans l’Affaire « Tigre Révolution » vers l’hôpital Bon secours de Kégué, à Lomé, le 4 mars 2020.
C’est alors qu’il était en train d’exercer son métier d’appoint de conducteur de moto-taxi communément appelé Zémidjan que, vers la résidence de la Caisse nationale de sécurité sociale, en face de l’Université de Lomé, il se fait héler par un vieux handicapé qui lui demande : « Mon petit, combien tu vas me prendre pour m’amener vers l’Hôpital de Kégué ? » Il lui répond : « 300 F » et, après que le vieux ait répliqué qu’il n’a que 250 F, il lui dit : « Papa, il faut monter ».
Alors qu’ils sont au milieu du parcours, arrivant vers la nouvelle présidence et tout juste devant les militaires préposés à sa garde, le vieux passager commence à l’importuner en lui disant : « Mon fils, tu vas trop vite ! » OURO-MEDJI Sadikou se tait et ne lui répond pas.
Mais, voilà que le vieux commence à le tirer par derrière, lui demandant s’il n’entend pas ce qu’il lui dit. C’est alors qu’il lui répond : « Papa, lorsque je suis à moto, dans la circulation, je ne parle pas », et le vieux répond qu’il va descendre de la moto dans le virage de la Mosquée dite de Kadhafi.
Après qu’OURO-MEDJI Sadikou lui ait répondu : « Papa, ici c’est accès interdit parce qu’il y a les militaires par-là », le vieux proteste, disant qu’il veut uriner et son conducteur insiste en répliquant, un peu agacé : « Papa, ici on ne descend pas ». Mais, entêté, le vieux a commencé à se saisir du guidon de la moto, menaçant de les faire tomber et obligeant son conducteur à s’arrêter. Il gare alors la moto sur le bas-côté de la voie et laisse le vieil homme descendre, pensant qu’il allait pisser.
Une fois son passager à terre, OURO-MEDJI Sadikou constate, peu après, qu’il a en main un téléphone portable auquel il a mis un casque-écouteur et remarque, qu’au lieu d’uriner, il est plutôt en train de téléphoner. Toujours sur sa moto, OURO-MEDJI Sadikou s’inquiète et l’interpelle : « Papa, allons-y non ? »
Quelques minutes à peine après, voilà que, brusquement, arrive une camionnette blanche de 15 places qui le coince avec sa moto sur le bas-côté de la voie et il en descend plus de 10 personnes portant des armes de gros calibre et tous en tenue civile, qui commencent à le frapper, le projettent au sol et se mettent à le traîner par terre.
Leur demandant ce qu’il a fait pour mériter un tel traitement, il constate que son passager, le vieux, reste là sans bouger, regardant tranquillement ses agresseurs se mettre à le gifler dans tous les sens et lui faire violence surtout lorsqu’il refuse de monter dans leur voiture.
En surnombre contre lui seul, ils réussissent finalement à l’immobiliser au sol, l’attachent par les mains dans le dos et aussi par les pieds vers le visage, au niveau des yeux. Puis, ils le soulèvent, l’enlèvent et le jettent dans leur voiture qui prend la direction du Camp GIPN d’Agoè-Logopé.
Arrivés sur place, on le met à la disposition du commandant du Camp qui le torture sauvagement pour lui demander : « Où sont les armes que tu as retiré au militaire ? » Il dit qu’il ne sait rien de ce qui lui est demandé et c’est alors que le commandant lui-même l’a grièvement blessé à la tête, le frappant avec un gros bâton dont le coup a fait gicler le sang de son crâne.
Ils lui disent alors : « Tu vois, non ? Si tu ne dis pas la vérité, tu vas mourir ici ! » Mais, OURO-MEDJI Sadikou maintient ses déclarations et le commandant du Camp va alors chercher de la lessive en poudre blanche de marque « So Klin » qu’il mélange avec de l’eau de javel, préparation qu’on verse sur lui avant de le bastonner sur tout son corps.
Ils lui demandent ensuite où se trouve son ami avec qui il était le jour où ils sont sortis pour prendre part à la marche. Il répond qu’il ne sait pas et, alors qu’ils ont commencé à lui brûler le dos, sous l’effet de la douleur atroce, il appelle le nom d’un ami, OURO-GNAOU Nazifou, juste pour avoir la paix.
Ils le prennent donc dans leur voiture pour aller chercher l’ami en question et, l’ayant trouvé, le ramènent aussi au Camp GIPN, bien qu’il ne savait rien au sujet des armes dont il est question.
Après que les coups administrés à OURO-GNAOU Nazifou l’aient grièvement blessé à la tête également, les agents reviennent vers OURO-MEDJI Sadikou en lui disant que, vu que c’est lui qui est en tête, c’est à lui que revient l’honneur d’inaugurer le nouveau supplice qu’on va leur infliger.
Et, joignant le geste à la parole, le commandant lui brûle le dos avec de l’eau de javel hyper concentrée, puis se met à le frapper jusqu’à ce que son dos soit complètement ensanglanté. Interpelant alors OURO-GNAOU Nazifou, on lui fait savoir qu’après qu’il ait bien vu le traitement qu’on vient d’infliger à son ami, on lui laisse jusqu’au lendemain pour « dire la vérité » car son tour sera arrivé. Sinon, c’est le même traitement qu’il va subir s’il ne leur propose pas de solution en leur montrant où se trouvent les armes.
C’est au lendemain de ce jour qu’on les a amenés pour les ajouter à d’autres de leurs frères Kotocoli qui venaient d’être arrêtés eux aussi comme MOUSSA Issa dit Zongolais et ALASSANI Saliou. Tous les quatre ont alors été enfermés dans une petite pièce, les mains attachées et les yeux fermés par des œufs pourris qu’on y a cassés, le tout dégageant une odeur si nauséabonde qu’on leur a déclaré que c’était fait à dessein pour qu’ils ne disparaissent pas.
Tous les quatre vivront ainsi durement un horrible calvaire pendant les 9 mois qu’ils passent ainsi enfermés et où, chaque jour, tous les agents font irruption dans la cellule pour les bastonner chacun, surtout les dimanches quand ils viennent pour le sport qu’ils pratiquent sur le terrain du Camp GIPN. Avant de commencer, ils viennent d’abord leur donner des coups en prétendant qu’il s’agit là de leur échauffement et ils les tapent notamment avec des machettes sur la plante des pieds.
Dans cet univers de méchanceté seul un agent de l’un des services s’est occupé d’eux, pris de pitié face à leur sort, se dévouant, d’une part, à prendre soin d’OURO-MEDJI Sadikou, le plus amoché de tous, qu’il a pris en photo en promettant d’aller en faire rapport aux autorités, d’autre part, en aidant aussi ses deux autres frères : MOUSSA Issa dit Zongolais et ALASSANI Saliou, dont l’argent qu’ils avaient sur eux a servi à lui acheter les produits pharmaceutiques que nécessitait son état de santé.
Quant à la moto de OURO-MEDJI Sadikou, elle est restée avec les agents du Camp GIPN alors que c’est une moto quasiment neuve, de marque SANYA 125, qu’il avait achetée à crédit et dont il n’avait même pas encore fini de payer les traites à son créancier-propriétaire.
Conduit à la Justice le 17 mars 2020 avec ses trois autres codétenus, il est présenté au Procureur de la République et au Juge d’instruction qui, après l’avoir auditionné, décident de l’inculper mais, contrairement à la pratique courante consistant à placer sous mandat de dépôt à la Prison civile de Lomé les détenus accusés comme lui dans la même affaire « Tigre Révolution », laissent ses tortionnaires le ramener au Camp GIPN d’Agoè-Logopé.
Ce n’est finalement qu’au bout de 9 bons mois au total passés sous la torture au Camp GIPN d’Agoè-Logopé qu’il est finalement ramené à la Prison civile de Lomé où il est toujours actuellement détenu.
Parce qu’il a subi des traitements cruels, inhumains et dégradants tout au long de son arrestation et de sa détention comme les 76 autres prisonniers politiques détenus dans l’Affaire « Tigre Révolution », OURO-MEDJI Sadikou doit être libéré immédiatement et sans condition comme le prescrivent le Code pénal togolais et les instruments internationaux ratifiés par l’Etat togolais.
Cela, d’autant plus qu’il a besoin d’aller se faire soigner par des médecins spécialisés en chirurgie réparatrice de la peau pour les graves blessures qui lui ont été faites sur le dos lorsqu’il a été délibérément brûlé des mains-mêmes du Commandant du Camp GIPN d’Agoè-Logopé.
Car les boursoufflures que la cicatrisation de ces plaies lui ont laissées sur le dos lui causent depuis leur apparition d’atroces démangeaisons qu’il n’arrive à calmer qu’en utilisant certains produits pharmaceutiques qui lui coûtent cher et qu’il n’a réussi à se procurer jusqu’à présent que grâce aux collectes de fonds faites à son profit par solidarité parmi ses codétenus et l’assistance humanitaire qui lui apporte ces derniers temps le Comité pour la libération de tous les prisonniers politiques du Togo.
Et, lorsque les dits médicaments s’épuisent, c’est d’atroces souffrances qu’il endure jusqu’à ce qu’ils soient renouvelés. Une situation des plus injustes car, n’ayant commis aucun crime, ce sont des agents dotés de l’autorité de la force publique qui portent l’entière responsabilité de la douloureuse situation dans laquelle il se trouve et qui relève d’une double peine qu’on lui inflige ainsi, par pure méchanceté.